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Bruno Berruti, est le responsable du projet Sentinelle-3,
qui fait partie du Programme Européen GMES (Global Monitoring
for Environment and Security). Il nous explique brièvement
les raisons d'être de ce programme opérationnel.
GMES est une initiative de la Commission européenne et de
l'Agence spatiale européenne née du besoin d'améliorer la
qualité des observations terrestres en matière d'environnement
et de sécurité des citoyens européens. Il vise à doter l'Europe
d'un système autonome et opérationnel d'information capable
d'observer la Terre à toutes les échelles (locale, régionale,
mondiale) et d'assurer la transition entre les capacités existantes
aujourd'hui et celles futures envisagées par l'Union européenne.
Concrètement, GMES fournira des informations opérationnelles
précises, actualisées et disponibles à l'échelle du globe,
à des entités locales, régionales, nationales et européennes,
offrant ainsi les moyens de développer des services et des
applications pour le suivi des terres émergées, des mers,
des océans et de l'atmosphère, ou encore pour des interventions
d'urgence et de sécurité.
Rôle de l'Union Européenne
Dans le cadre de GMES, l'Union Européenne prend l'initiative
d'identifier et de compiler les besoins des utilisateurs et
de fédérer les volontés politiques favorables à des objectifs
d'action élargis. Elle veille également à la disponibilité
et à la continuité des services opérationnels permettant d'appuyer
ses politiques. Elle contribue enfin au développement, au
déploiement et à l'exploitation de l'infrastructure spatiale
européenne correspondante tout en faisant appel, autant que
possible, aux moyens d'ores et déjà disponibles (ou en projet)
en Europe et notamment à ceux d'Eumetsat.
Rôle de l'ESA
Pour sa part, l'ESA est chargée de mettre en œuvre la composante
spatiale spécifique de GMES. Son rôle consiste donc à développer
la série des satellites Sentinelles, à réaliser le segment
sol correspondant, et à coordonner l'accès aux données issues
de ces satellites et d'autres missions (essentiellement des
missions réalisées par des Etats membres de l'ESA) pour contribuer
à répondre aux besoins en matière de services GMES.
Les Sentinelles de l'espace
C'est en février 2008 qu'est signé l'accord cadre entre l'ESA
et l'UE qui officialise le programme Sentinelle. Il permet
de lancer la réalisation des 3 trois premiers satellites Sentinelles
(Sentinelles 1, 2 et 3) et de mettre en place le segment sol
nécessaire à la réception, au traitement et à la diffusion
des données (provenant des Sentinelles et d'autres satellites)
aux utilisateurs. Lors du dernier Conseil de l'ESA au niveau
Ministériel qui a eu lieu en Novembre 2008, la décision a
été prise de développer 3 satellites supplémentaires et identiques
aux 3 premiers, qui sont nécessaires pour remplir tous les
besoins opérationnels et de performance établis pour ces missions,
ainsi que 2 missions supplémentaires : Sentinelle-4 & 5.
Ainsi, les sentinelles sont groupées en 4 familles :
- Sentinelle-1 destiné à développer une famille de satellites-radar
en bande-C. Il prendra des images radar 24 heures sur 24,
par tous temps, pour le suivi des océans et des terres émergées
;
- Sentinelle-2 observera les terres émergées. Il sera équipé
d'une imagerie optique à haute résolution de façon à fournir
aux utilisateurs des images multi-spectrales haute-résolution,
dans un grand nombre de bandes spectrales ;
- Sentinelle-3 destiné à développer des satellites pour l'observation
de la surface des océans et des terres émergées au moyen d'instruments
optiques moyenne résolution fonctionnant dans le visible (couleur),
le proche infrarouge et l'infrarouge lointain (température).
De plus, d'autres capteurs micro-onde embarqués, mesureront
la hauteur de la surface survolée, et permettront ainsi de
poursuivre les activités d'altimétrie maritime déjà engagées
par le biais de programmes franco-américains notamment (Topex-Poséidon
puis Jason) et Européens (ERS et ENVISAT);
- et Sentinelle-4 & 5 plus spécialement destinés à l'analyse
atmosphérique.
D'ERS à Sentinelle en passant par Envisat
GMES ne part pas de rien, loin s'en faut. ERS-1, le premier
satellite d'observation de la Terre a été lancé en 1991 sur
une orbite polaire, à quelque 800 km d'altitude. Il sera rejoint
par son jumeau, ERS-2, en 1995. Équipés tous les deux d'un
radar à ouverture synthétique, d'un radiomètre et d'un altimètre
radar ils sont les premiers à voir les modifications dans
la machine climatique.
Pour répondre aux besoins identifiés par les missions ERS,
l'ESA lance en mars 2002 Envisat, à ce jour la mission la
plus ambitieuse de l'Europe en matière de satellites. Equipée
de 10 instruments, cette plateforme de 8 tonnes est également
le satellite civil EOS le plus important qui ait jamais été
réalisé dans le monde. Les données fournies par Envisat vont
alerter les scientifiques sur l'urgence de la situation et
contraindre les politiques à réagir car, pour comprendre ce
qui passe les scientifiques prennent conscience que le nombre
de paramètres à prendre à compte est si important que des
satellites de type Envisat ne sont pas dimensionnés pour les
analyser.
Envisat a mis en évidence l'utilité de petites missions très
spécialisées pour analyser de façon ininterrompue les phénomènes
environnementaux qui influencent l'environnement terrestre.
Une panoplie d'applications, encore expérimentales, vont prendre
une dimension opérationnelle dans le cadre des services GMES.
Ainsi, dans les cinq ans, l'Europe prévoit-elle de mettre
en orbite une trentaine de satellites d'observation qui vont
scruter notre planète sous toutes les coutures, en faire voir
de toutes les couleurs sur ses changements et caprices, caractériser
la surface terrestre dans son ensemble, donner l'alerte en
cas de danger imminent.
Note
Bruno Berruti est en charge du projet Sentinelle-3 à l'ESA,
et dans ce rôle, il interface en particulier avec :
- le consortium industriel mené par Thales Alenia Space ;
- de l'Organisation européenne de satellites météorologiques
(Eumetsat) qui sera en charge de l'exploitation de Sentinelle-3
fournissant des produits en temps réel et en différé aux services
de surveillance du milieu marin ;
- du CNES qui apportera son expertise technique sur les questions
liées à la topographie ;
- de l'ESRIN qui sera en charge du traitement des données
de la charge utile (Italie) ; - et de l'ESOC, le Centre de
Contrôle des Opérations de l'ESA, situé à Darmstadt.
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